Suggestion of the day

Jeffrey Lee Pierce est un héros. Incandescent, flamboyant, cintré
du ciboulot, expédié en enfer par la grande porte beaucoup trop
prématurément. Bien plus tôt, Jeffrey était un fan, un gamin qui
idolâtrait Blondie, le punk, le blues et la country et qui grattait le
papier dans des fanzines modestes. Quelques accords en poche
plus tard, il part au charbon sans aucune retenue. Et durant toute
sa carrière, on pourra ressentir qu’il portait son legs comme
certains portent leur croix.

The Gun Club déjà. Tout un programme. Puis on lit « Fire Of Love » (du nom du titre culte de Jody Reynolds, qu’ils reprendront sur l’album
suivant). Tout cela mis bout à bout, forcément, ça ne pouvait que
décaper. Comme il se doit, l’album est foudroyant. D’entrée de jeu,
« Sex Beat » terrasse. Du swamp punk fangeux déguisé en blues que chante un Jeffrey écorché, à la manière de ces fameux outlaws
cramés de la country qu’il révère.

Et le blues, parlons-en. Le groupe revisite Tommy ou Robert Johnson,
la guitare slide dérape, les percussions, tribales font remonter à la
surface chaque fantôme des bas-fonds, ça racle dangereusement.
Une belle bande de bras cassés jetés corps et âme dans leur prêche.
Du tourbillon « She’s Like Heroin To Me », à « For The Love Of Ivy »,
qui voue son culte à la vénéneuse déesse des Cramps, tout ici exhale
une authenticité ombrageuse et rédemptrice. Et c’est juste beau.

M.

The GUN CLUB
« Fire Of Love »



Suggestion of the day

Voilà ce que l’on appelle un disque culte. Une plaque qui n’était même pas vouée à exister. Pour rappel, les Moderns Lovers première mouture n’ont jamais sorti le moindre album officiel. Tout au plus de solides
démos. Des sessions avortées. Des bricoles à peine abouties.
La perfection totale, en somme.

Le groupe se forme au début des années septante et, autour de Jonathan Richman, se fige le noyau dur de la période mythique. Jerry Harrison, qui enchaînera avec les Talking Heads, David Robinson, qui s’accointera avec Ric Ocasek pour former les Cars et Ernie Brooks, futur associé de Arthur Russell au sein des éphémères et brillants Necessaries.
Voilà pour le CV.

Une session trop vite pliée en 72, pilotée par le frappadingue notoire
Kim Fowley (écoutez son « I’m Bad » sorti la même année) émousse le groupe et quand en 73, tout ce beau monde se pointe en studio, Richman en a déjà plein le dos. Trop de galères, des morceaux dont il a fait le tour, un son qui ne lui colle plus à la peau. Sans parler des embrouilles de
studio avec John Cale, aux manettes, et avec… un peu tout le monde.
Les portes claquent. Pour de bon.

Il faudra patienter jusqu’à 76 pour que Richman déterre les bandes
et ne publie enfin ce qui reste l’un des albums les plus précurseurs
d’une époque qui n’en manque pourtant pas. Une posture revêche,
un orgue aigrelet, une rythmique convulsive et une guitare aussi
inflexible que la prose. A n’en point douter, son caractère désinvolte, abrupt, caustique et percutant fait un peu de ce disque, l’équivalent
du Velvet Underground pour les années punk. Le mythe, le fantasme,
la pureté. La modernité éternelle.

M.

The MODERN LOVERS
« s/t »



Suggestion of the day


Voici l’un des disques majeurs de la génération punk rock contestataire britannique .

Nous sommes en 79 dans le Londres des années dures où le début du thatchérisme fait rage. Chômage, grèves, inflation,…
Autant vous dire qu’il y a du pain sur la planche pour notre bande de militants « anars » défenseurs de droits sociaux et raciaux.

Le quatuor dirigé par Joe Strummer et Mick Jones tous deux à la guitare et au chant, Paul Simonon (bass) et Topper Headon (batterie) va nous pondre une véritable tuerie diamétralement différente des deux albums précédents nettement plus radicaux. Toujours du punk rock bien senti mais orienté désormais vers des sonorités plus variées tel que reggae, jazz, garage et même de rockabilly.

Avalanche de morceaux imparables sur plus de soixante minutes qui passeront comme une lettre à la poste.

A écouter sans modération.
Bonne écoute et surtout  Play Loud… London Calling …Tatatata ta tang..!

Jack

the CLASH
« London Calling »



Suggestion of the day

Agitation Free n’est pas le groupe allemand que l’on caserait
sur-le-champ dans les rayons krautrock. Ni foncièrement motorik,
ni fondamentalement space, non. Leur truc à eux, c’est le brassage
culturel. Une vision globale et baroudeuse de la musique. L’Institut Goethe prendra leur détermination au pied de la lettre et les enverra swinguer aux confins du Liban, de l’Égypte, de la Grèce et de Chypre.

Ce périple plus tard, le groupe déborde d’idées aussi millénaires
qu’innovantes, un premier album dans les poches. Ce disque, vous
l’aurez compris, est un voyage ininterrompu où se mêlent influences
psychédéliques et emprunts aux musiques traditionnelles tandis que drones et field recording lient savamment la sauce.

On commence en douceur, alors que les bongos et la guitare électrique se mettent doucement en branle, avant qu’un extatique grondement, tout en suspension, ne se fasse mettre en lambeaux par un court passage hard rock. Un orgue primesautier surgit du néant, dans une approche
inhérente à l’école de Canterbury (Soft Machine, Gong, Egg, …), et
s’acoquine crânement avec des tablas survoltés et une basse gironde.

Voilà, la première face vient de se terminer et le temps semble figé. Si l’aller vous a subjugué, laisser vous portez vers la platine. Le retour, je vous laisserai en juger, vaut assurément le déplacement. Pensez à
attacher votre ceinture. Et à se libérer du reste.

M.

AGITATION FREE
« Malesch »