Il faut pouvoir se l’enfiler, cette merveilleuse chanson dans laquelle s’épanche Abner Jay. « Je suis si déprimé. Que quelqu’un m’aide, caresse ma tête alors que je m’allonge sur mon lit » qu’il implorait. Et lorsque l’on se renseigne un peu sur le bonhomme, on saisit bien l’ampleur du
tracas. Même si certains de ses illustres pairs comme B.B. king ou
Muddy Waters le citaient à qui mieux mieux, rien n’y fit. Misère,
insuccès et désillusion jalonnèrent son quotidien. Jamais pourtant,
la résignation ne vint poindre le bout du nez.
Qu’importe, sa formule one-man-band lui permet toutes les audaces.
Lui qui n’en manque pas fera donc presser ses disques lui-même.
S’arrêter ? Lever le pied ? Se conformer au système ? Au contraire, chantre d’une satire sociale doublée d’un clairvoyant franc parler,
il tirera parti de cet humour théâtral propre aux tragédiens, la force d’asséner ce que d’autres subissent.
En ce, on comprend pourquoi le bluesman aimait se surnommer
‘the last working southern black minstrel’, lui qui, nomade, passera
sa vie à sillonner le monde à bord de son camping-car, voué à dispenser les chroniques les plus acérées, « Vietnam », « I Wanna Job », comme les confessions les plus crues, « Cocaine » et donc ce magistral « I’m So Depressed ». La suggestion du jour, dès lors, sera de tenir bon..
M.
Abner JAY
« True Story Of Abner JAY »