Suggestion of the day

En cet épisode de difficulté, … Je reprends pardon. En cette satanée
période merdique que l’on traverse, comme dans toutes les autres épreuves qui jalonnent une vie, j’ai parfois comme ça, sans prévenir,
un retour de flamme du sang. Le sang, vous savez, celui qui circule
dans les veines, qui façonne, qui irrigue…

Mon cœur est fondamentalement belge mais ce sang, tout aussi dilué soit-il, a toujours gardé une légère coloration latine entretenue par le bon vin. Et donc, en ce moment, ravitaillée par la petite épicerie ritale
de mon quartier, bastion s’il en est face à la morosité ambiante, mon humeur vit au gré d’antiques saveurs italiennes.

Idem pour les oreilles. Pas un jour sans Lucio. Et je ne vous parle
pas (que) de mon fils, lui qui a hérité du prénom de l’un de mes plus
sémillants piliers, Lucio Battisti. Le bonhomme m’a certainement
autant nourri que ma nonna. Ce qui, vu les tables qu’elle avait
tendance à faire déborder, relève du tour de force. Et pendant
qu’elle entretenait mon tour de taille, le chanteur soufflait les braises d’un feu qui ne s’est jamais éteint.

Adulé par tout un peuple, Lucio Battisti est un monument.
Des chansons inoubliables, un succès insolent, une estime
nationale. Il décide pourtant, dès 1972, de saborder sa vie publique.
Il quittera les planches sans le moins du monde amenuiser sa
résonance et a continué, inséparable de son parolier Mogol, à sortir
des disques séduisants, intrigants, voire divinement extravagants.

« Il Nostro Caro Angelo » et sa pochette démente fait partie de ceux-ci.
Il y a là de la pop psychédélique, de la world barrée, du rock bariolé et une bonne dose de groove aliéné. Et si vous me suivez toujours après
tel déballage, je peux vous assurer que je l’aime sans commune mesure. Anima Latina

M.

Lucio BATTISTI
« Il Nostro Caro Angelo »


Suggestion of the day

Quand il s’agit d’évoquer la scène folk anglaise, Michael Chapman
n’est que rarement le premier cité. John Renbourn, Richard Thompson, John Martyn ou le légendaire Nick Drake (j’en frissonne), évidemment tout aussi recommandables, là n’est pas le sujet, ont
davantage bénéficié d’une exposition médiatique (toute relative
s’entend). Pourtant…

Dès le premier disque, il frappe fort. « Rainmaker » est solide. Son
talent de guitariste, d’emblée, saute aux oreilles. Mais Chapman, tout aussi virtuose qu’il est, s’évertue à déployer sa maestria au service de vraies chansons. Le suivant, « Fully Qualified Survivor », en est à mon sens la parfaite illustration. A ce titre, « Postcards of Scarborough »,
entamée par ce doigté typique, vire un temps ballade avant le déluge électrique, tandis que « The Aviator » s’étale sur neuf minutes si
brillamment charpentées qu’elles en paraissent trois.

Mais le nirvana, cette guitare électrique insensée qui parcourt si
intensément cet album et expédie dans une autre dimension des morceaux comme « Stranger In The Room » ou « Soulful Lady », c’est
la présence au casting de ce diable de Mick Ronson, qui embrasera
bientôt les joyaux à venir de Bowie, qui va le débaucher dans
la foulée pour « Hunky Dory ».

Et le plus beau dans tout ça, c’est que si Mick et David ont depuis
entamé une retraite cosmique, Chapman, grand seigneur, tourne
(il a encore récemment illuminé les Ateliers Claus, merci encore) et enregistre encore, flanqué de certains de ses rejetons spirituels,
Nathan Bowles ou Steve Gunn. Une légende en marche…

M.

Michael CHAPMAN
« Fully Qualified Survivor »

Suggestion of the day

1969, les frères Pat et Lolly Vegas, native americans d’origine
Yaqui et Shoshone, remportent un concours de chant organisé
par Coca-Cola. Motivés par l’expérience, ils foncent à L.A. pour
tenter leur chance.

Hendrix, lui-même d’origine Cherokee, leur suggère
de former un groupe 100 % indien. Conseil suivi à la lettre.
Ce premier double album invente ce que l’on pourrait qualifier
d’Indian Funk. Principalement ces longs instrumentaux au son
dément qui parsèment les quatre faces de cet ovni.

La notoriété sera au rendez-vous via le titre « The Witch Queen of New-Orleans ». L’Europe rendra grâce à « We Were All Wounded on Wounded Knee », qui évoque le massacre des Sioux à Lakota en 1890. Single engagé et donc, banni des ondes U.S.

DD

REDBONE
« s/t »

Suggestion of the day

En parlant d’amour…

Kevin Ayers a tout du demi-dieu. Un univers, un charisme, un timbre
obsédant, un sens absolument inné de la chanson, des albums
fabuleux et bien sûr une reconnaissance populaire éternelle. Pardon?
Ça non? Attendez, non, on me signale que non..

Démarrée avec Soft Machine, la carrière de Kevin Ayers est pavée
de ritournelles diaboliquement exquises, qu’il prend souvent soin
de chiffonner un peu. Histoire qu’on les mérite en grattant bien,
allez savoir… « Joy As a Toy », « Shooting At The Moon » et « Whathevershebringswesing » sont d’indéboulonnables bijoux. Mais « Bananamour » est, comment dire, juste magistral(ement à mon goût).

« Don’t Let It Get You Down » qui ouvre le bal semble issue d’une
session oubliée de « Sgt. Pepper », « When Your Parents Go To Sleep »
est le meilleur exemple d’une blue-eyed soul acidulée (si cela avait
été inventé), la berçante « Hymn » est partagée avec Robert Wyatt
et « Decadence » est le prototype de tout ce que Spacemen 3 fera
lanciner des décennies plus tard.

Tout carillonne, pétille, submerge…
« Oh. Wot A Dream »…

M.


Kevin AYERS
« Bananamour »